Potentiel attrayant pour la microfinance
Le secteur a le vent en poupe. L’entreprise genevoise Symbiotics fête dix ans de succès . Elle entend doubler ses actifs sous gestion d’ici à trois ans.
A près dix ans d’existence, Sy mbiotics s’impose comme une belle réussite suisse dans la microfinance et se mue en gestionnaire mature dans la finance durable. L’entreprise est née à Genève en 2005, déclarée «Année internationale du microcrédit» par l’Assemblée générale de l’Onu.
Figurant parmi les leaders de la microfinance en Suisse, elle facilite l’accès au crédit pour les petits entrepreneurs des pays en développement qui ne peuvent obtenir des prêts bancaires classiques. Concrètement, elle canalise l’argent des investisseurs suisses et internationaux vers les institutions de microfinance qui prêtent à de petits commerçants ou à des agriculteurs au niveau local.
«Le business model de Symbiotics est d’être un guide pour les investisseurs sur le marché de la microfinance», résument ses fondateurs, les Genevois Roland Dominicé et Vincent Dufresne.
Le CEO, Roland Dominicé a fait partie des pionniers genevois de la microfinance, ayant travaillé trois ans comme directeur financier pour BlueOrchard, première société de microfinance fondée en 2001, «sur la base d’une idée qui avait mûri depuis 1998», avant de partir fonder Symbiotics.
«Aucun investisseur n’a l’infrastructure pour investir localement dans la microfinance, et nous offrons une recherche et un conseil experts dans ce domaine», indique Vincent Dufresne, CEO adjoint. Aujourd’hui, Symbiotics gère des encours à hauteur de 1 milliard de francs investis dans le microcrédit. Cet argent permet de financer les prêts octroyés par les institutions locales à des foyers à bas revenus et des microentrepreneurs. Au vu de son rôle, Symbiotics se prévaut d’être un «leader de la finance durable et inclusive (impact investing)».
Plutôt que de s’activer dans les grands pays émergents, qui ont dépassé les premiers stades du développement, Symbiotics a plutôt ciblé ces dernières années les pays frontières comme la Bolivie, le Pérou ou le Cambodge. «Nous couvrons aujourd’hui 50 pays frontières, - à travers 200 institutions locales», indique Roland Dominicé.
L’entreprise, qui ne divulgue pas son chiffre d’affaires, peut attester d’un essor continu depuis sa création. «Nous avons connu une croissance moyenne de 40% par an ces dix dernières années, et avons engagé 32 personnes en 2014, pour en totaliser 85 aujourd’hui», souligne Vincent Dufresne. L’entreprise a des bureaux à Zurich, Londres, Le Cap, Mexico et Singapour.
L’activité de Symbiotics recèle un vaste potentiel. «Le marché de la microfinance pèse entre 80 et 100 milliards de dollars, et les besoins de microcrédit sont estimés à 250 milliards, à raison de 500 dollars multipliés par environ 500 millions de microentrepreneurs potentiels», selon Roland Dominicé.
Investissement responsable - -
La microfinance est considérée comme un investissement durable et socialement responsable, car il représente une approche au développement qui favorise l’autonomie économique et financière. Approche à ne pas confondre avec l’humanitaire. L’objectif des prestataires reste de gagner de l’argent.
Les institutions locales de microfinance ne font pas de cadeaux à leurs petits clients: les taux d’intérêt sur les micro-prêts atteignent - en moyenne 20 à 30%. «Ils sont d’autant plus élevés que le montant du prêt est petit», précise Roland Dominicé.
Plus la micro-banque est inclusive et cherche à financer des plus petites entreprises dans des régions plus reculées, plus le coût fixe du prêt devient relativement élevé pour son emprunteur. Par contre, les institutions de prêt s’imposent de ne jamais prendre plus de la moitié de la marge nette de leur client en remboursement.
«Mais avec de petites sommes, même s’il faut payer 40% d’intérêt pour en disposer, un micro-entrepreneur du Sud peut agrandir son affaire, s’acheter des équipements, et obtenir au final un retour sur investissement nettement supérieur, souligne Roland Dominicé : il n’est pas rare de voir des marges de plus de 100% dans des micro-entreprises, en particulier dans les phases initiales de l’activité ainsi financée, et c’est à cette aune qu’il faut juger les taux d’intérêt pratiqués».
Quant au risque de crédit, il est très faible, avec des taux de défaut ne dépassant pas 2,5%-3%, et ne saurait à lui seul expliquer des taux d’intérêt de cet ordre, qui s’inscrivent bel et bien dans un modèle économique de forte croissance, au gré duquel le micro-entrepreneur bénéficiera d’une éducation financière et d’une aide à l’autonomie entrepreneuriale.
Ce modèle de crédit ne fonctionnerait plus dans les économies occidentales à faible croissance et parfois déflationnistes; il offre dès lors une opportunité d’allocation de capital importante pour des investisseurs européens ne sachant plus où se tourner pour retrouver de la création de valeur à long terme.
Il existe quelque 111 fonds de placement spécialisés dans la microfinance au plan mondial, qui investissent 10 milliards de dollars sur ce marché et croissent à 10-20% par an. «Parmi ces investisseurs, 40% sont des institutionnels », précise le CEO. Environ un quart de ces actifs, soit 2,5 milliards, est géré depuis la Suisse, ce qui en fait un pays leader dans l’investissement en microfinance.
Phénomène porteur, les investisseurs privés dans la microfinance sont en train de dépasser les investisseurs publics initiaux, relèvent les patrons de Symbiotics. En Suisse, les caisses de pension s’ouvrent lentement à ce type de placements, qui affiche un rapport risque/rendement attrayant: sur 10 ans, le SMX, l’indice de référence de la microfinance créé par Symbiotics, qui agrège les principaux fonds obligataires dans le monde investis dans la microfinance, affiche un rendement moyen de 4%, pour une volatilité de 0,6%. En comparaison, l’indice obligataire global de JP Morgan surperforme légèrement le SMX, mais avec une volatilité de près de 3%.
Cette année, Symbiotics s’offre un objectif ambitieux : doubler ses actifs sous gestion d’ici à trois ans. Par ailleurs, l’entreprise, devenue une société d’investissement mature, se profile dans les instruments de placement plus sophistiqués, en élargissant sa palette au private equity (sociétés non cotées), aux actions et obligations cotées, et aux obligations à haut rendement (high yield).
Cela, en restant axée sur les pays émergents et frontières, et en préservant son approche durable et socialement responsable. Objectif : permettre aux investisseurs de cibler également des entreprises qui sont à un stade de développement plus avancé, et qui sont intégrées à la chaîne économique de la microfinance.
Symbiotics se prévaut d’attirer des talents grâce à sa culture d’entreprise. «Les collaborateurs qui nous rejoignent sont en général motivés de participer à cette activité, car la microfinance confère un sens à leur travail qu’ils ne trouvaient pas forcément dans des institutions financières classiques», observe Vincent Dufresne.
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.