Pourquoi renoncer à sa nationalité américaine ?
Chaque année, le nombre de renonciations à la nationalité américaine augmente. Le précieux sésame offre pour certains plus de désavantages que de prérogatives.

Les Etats-Unis sont le pays de nombreuses opportunités pour des millions de personnes, dont la plupart risquent parfois leur vie pour rejoindre cette terre promise. Mais il arrive aussi que des citoyens souhaitent quitter le pays ou renoncer à leur nationalité américaine.
Certes, même si le nombre d’abandons de passeport ou de «green card» (US lawful permanent resident card) augmente chaque année, il reste minime par rapport à ceux qui obtiennent dans le même temps le précieux sésame. En 2017, le nombre de renonciations s'est monté à environ 6800, soit une hausse de 26% par rapport à 2016 (5411) qui était déjà en hausse de 26% par rapport à 2015.
Le rythme de retraits a, en effet, augmenté en 2010 suite à l’adoption d’une nouvelle loi visant à endiguer l’évasion fiscale des citoyens américains vivant ou travaillant à l’étranger: la Foreign Account Tax Compliance Act (FATCA) qui obligeait alors les institutions financières étrangères à déclarer au Trésor américain les actifs détenus par leurs clients. L’accord conclu entre la Suisse et les Etats-Unis sur l’application FATCA est entré en vigueur le 2 juin 2014.
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Alors que la nationalité américaine (et dans une certaine mesure la «green card») offre de multiples avantages – incluant le droit de vivre aux Etats-Unis, de voyager autour du monde et de voter aux élections américaines – les obligations des citoyens ne sont pas aussi nombreuses selon Eva Farkas-DiNardo, avocate au barreau de New-York. Les citoyens ne sont, par exemple, ni obligés de faire le service militaire, ni de voter aux élections présidentielles ou locales. Pour rappel, en Europe, se rendre dans les urnes est obligatoire en Belgique, au Luxembourg, en Grèce, au Danemark, au Liechtenstein et à Chypre. En Suisse, c’est le canton de Schaffhouse qui a rendu le vote obligatoire sous peine d’amende.
Ainsi, si les avantages sont multiples et les obligations minimes, qu’est-ce qui pousse alors les citoyens américains vivant à l’étranger à rendre leur passeport bleu? La raison principale est le nombre démesuré de formulaires à remplir et de taxes à payer s'ils ne vivent pas sur sol américain. En effet, les Etats-Unis sont le seul pays au monde à faire reposer le statut du contribuable sur la nationalité et non sur le lieu de résidence.
Le fardeau de la conformité fiscale
Ainsi, les personnes américaines (avec passeport ou green card) sont dans l’obligation de remplir une déclaration de revenus et payer des impôts aux Etats-Unis peu importe où elles vivent, gagnent ou placent leur argent dans le monde. En outre, ces mêmes personnes sont assujetties à l’impôt sur les donations et les dons, sur les successions et sur leur patrimoine immobilier.
En plus des déclarations de revenus et des formulaires connexes, les citoyens américains sont tenus de remplir le formulaire 114 du Financial Crimes Enforcement Network Form généralement appelé «rapport de compte bancaire étranger» (FBAR pour Foreign Bank Account Report). Les citoyens sont ainsi dans l’obligation de déclarer tous les actifs bancaires et financiers étrangers si la valeur totale des comptes excède 10'000 dollars à n’importe quel moment de l’année civile.
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Les comptes à déclarer comprennent les comptes bancaires, les comptes d’investissement, les comptes d’assurances, les pensions, les comptes de crédit ou tout autre dépôt dans les banques. Des comptes détenus par des trusts, des sociétés ou autres entités peuvent être assujetties à la déclaration si la personne en question détient plus de 50% de l’entité. Depuis 2017, le rapport de compte bancaire étranger est obligatoire avec la déclaration d’impôt. L’oubli de déclaration - notamment volontaire – peut engendrer de sévères sanctions – civiles et potentiellement pénales – allant jusqu’à une facture de 50% du montant total non déclaré par le citoyen américain.
Sans compter qu'ouvrir un compte en banque en dehors des Etats-Unis est devenu un véritable parcours du combattant pour les citoyens américains. En effet, les nombreuses exigences de conformité ainsi que les formulaires administratifs à remplir ( IRS Form 9 ) freinent les institutions financières à prendre ces clients.
D’autant que de nombreuses banques non-américaines ont des difficultés à appliquer ces règles et à remplir ces formulaires. C’est l’une des raisons principales qui ont poussé de nombreux Américains vivant à l’étranger à renoncer à leur nationalité. Toutes comme les contraintes administratives et les coûts (fiduciaires, avocats) liés à la déclaration fiscale.
Ainsi, une personne désirant s’expatrier doit tenir compte à la fois de son statut d’immigration aux Etats-Unis et de sa situation financière. A savoir que pour deux personnes aux même moyens financiers, les résultats peuvent être très différents selon les définitions précises du statut d’immigration du Trésor américain.
Procédure d’expatriation
Le processus de renonciation à la citoyenneté américaine dure plusieurs mois mais consiste en gros à prendre rendez-vous dans une ambassade américaine, à comparaître pour une entrevue sous serment – exit Interview - et à remplir divers formulaires du Département d’Etat dont un formulaire «anti-patriotique» dont le but est probablement de dissuader les candidats à l’expatriation. Ce n’est ensuite qu’avec l’accord de l’IRS que le certificat de renonciation sera délivré. Il permettra, en principe, aux anciens Américains de retourner aux Etats-Unis sans difficulté.
Ce n’est cependant pas toujours le cas. En effet, récemment, des citoyens suisses ayant rendu leur passeport bleu se sont vus refuser d’office la procédure simplifiée ESTA pour un voyage privé de courte durée aux Etats-Unis explique une source souhaitant restée anonyme. «Ils doivent désormais se rendre à l’Ambassade américaine à Berne pour faire leur demande de visa. C’est en contradiction complète avec la circulaire délivrée lors de l’expatriation qui laissait entendre qu’une personne ayant renoncé à sa nationalité serait traitée comme une personne étrangère normale».
Il faut aussi rappeler que, si l’IRS estime que les raisons de l’abandon du passeport sont fiscales, il peut refuser l’expatriation. «Tout le processus dure plusieurs mois, sans compter que les anciens citoyens américains doivent encore déclarer leurs impôts pendant trois ans», rajoute cette source. Rappelons aussi que des citoyens américains, sous certaines conditions, peuvent être soumis à «l’Exit Tax», soit un impôt pouvant monter jusqu’à 40% à partir de deux millions de francs de fortune.
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