La crise de l’environnement moteur du tourisme scientifique
Tout au long de l'été, Bilan explore les tendances du tourisme: sciences, musique, pèlerinages, architecture, oenologie, agritourisme, vélo,... Des focus à retrouver deux fois par semaine sur notre site web. - De plus en plus de gens choisissent de voyager non seulement «intelligent» en suivant des guides-scientifiques mais aussi «utile» en s’engageant dans des formes de sciences citoyennes. Inventaire non exhaustif.

Embarqué à bord du bateau de l’ONG suisse Ocean Care , Roman Lehner découvre, il y a sept ans, l’ampleur de la pollution des mers par les plastiques. On parle alors beaucoup du septième continent de plastique. Lui constate qu’en se fragmentant ces déchets deviennent des microplastiques qu’absorbent mollusques, poissons, cétacés… jusque dans les coins reculés de l’océan Indien.
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Jeune chercheur en biologie moléculaire, Roman Lehner se demande alors comment mettre ses connaissances au service de la protection de l’environnement? Il va d’une part orienter ses recherches sur ce domaine au sein de l’Institut Adolf Merckle où il travaille à Fribourg.
L’odyssée des microplastiques

«Accroitre la prise de conscience de la population est déterminant parce que le problème est largement sous-évalué et mal connu», explique-t-il aussi. C’est ce qui l’amène en 2018 à créer l’association Sail & Explore afin d’emmener le grand public dans des missions d’exploration destinées à recueillir en pleine mer des échantillons d’eau contenant des microplastiques.
Associé au skipper Philipp Haefelfinger, il monte une première expédition avec des groupes de «touristes scientifiques» qui se relaient pendant quatre semaines pour prélever des échantillons en mer tyrrhénienne entre Gènes, l’Ile d’Elbe et Olbia. L’expérience est renouvelée en juin dernier et une nouvelle expédition, pour laquelle il reste quelques places, aura lieu en août prochain aux Açores.

A bord, les scientifiques-citoyens, qui ne paient que pour les frais du voyage, bénéficient de l’expérience de Philipp quand il s’agit d’améliorer leurs connaissances hauturières. Et Roman, apportant sa caution scientifique, les guide pour effectuer les prélèvements, les premières analyses… Les données sont introduites dans la base sur la pollution des océans par les plastiques de l’ONG californienne 5 Gyres qui organise des expéditions semblables.
L’éclipse de l’Atacama
Le cas de Sail & Explore illustre une demande croissante pour une forme de tourisme non seulement «intelligent» - en quête du savoir des scientifiques - mais au-delà participatif, avec des formes de science citoyenne. C’est en tout cas ce qu’observe l’agence Excursia , créée il y a 15 ans à Nantes dans le but de vulgariser les sciences tout en découvrant l’environnement.
Ce voyagiste organise ainsi non seulement des périples avec des naturalistes, par exemple au Pantanal au Brésil, ou des ornithologues, par exemple au Kazakhstan, mais aussi des voyages astronomiques en collaboration avec la Ferme des Etoiles (parrainée par l'astrophysicien Hubert Reeves) et aussi géologique ou volcanologique avec des spécialistes. Pour l’éclipse solaire qui a lieu le 2 juillet, l’agence a ainsi préparé un voyage au Chili non seulement pour observer le phénomène mais aussi avec des visites des observatoires d’El Paranal, d’Alma et de La Silla dans le désert d’Atacama.
Dans le registre sciences humaines, on peut aussi citer les Routes du savoir de l’agence Arts&Vie. Pour ceux qui se passent de voyagistes on conseillera le guide en ligne Atlas Obscura . Il permet de dénicher des lieux méconnus, cachés ou insolites en utilisant le filtre “science”.
Il n’est toutefois pas nécessaire de partir loin pour apprendre et participer à la science. Responsable Communication d’Excursia Pauline Tizon constate ainsi une forme de retour à des voyages de proximité. «On a de plus en de demandes pour des destinations en Europe par des clients qui se soucient de l’impact du transport aérien. »
Dans les souterrains du CERN
Notre pays offre de ce point de vue moult opportunités. En commençant par un certain nombre d’institutions visitables par le grand public.
A Genève, c’est le cas du CERN . En 2018, le centre de recherche sur la physique des particules a accueilli 135,000 visiteurs en visites guidées (gratuites mais sur réservation). L’évolution est stable depuis 2017 mais c’est parce que la capacité maximale a été atteinte. Selon Loraine Massarotti en charge des Relations locales et Evénements Globe, «le CERN reçoit environ trois fois plus de demandes que ce qu’il peut accepter. » Du coup, l’organisme favorise l’accès des visites guidées aux écoles et universités en leur permettant de réserver neuf mois à l’avance. Ainsi, de l’ordre de 15% des visites guidées sont réservées par des touristes autres que scolaires.

Le CERN organise aussi des expositions permanentes et temporaires ouvertes au grand public en libre accès. Dans l’exposition Univers de Particules qui se trouve au Globe de la science et de l’innovation, les visiteurs explorent les questions de la physique contemporaine que les physiciens du CERN tentent de résoudre. Au Microcosm , ils découvrent les immenses instruments utilisés par les scientifiques du CERN et les applications quotidiennes des technologies qui y sont développées. S’ils disposent de plus de temps, ils peuvent faire le tour du Grand collisionneur de hadrons (LHC) en surface et à vélo grâce à un Passeport Big Bang .
Le Globe de la Science et de l’innovation offre aussi un programme d’événements publics sur les sciences et les technologies destiné au plus grand nombre Enfin Les 14 et 15 septembre prochains, le CERN ouvrira ses portes au grand public pour deux journées exceptionnelles. « Ces journées portes ouvertes sont une tradition lors de la période de « long arrêt », au cours de laquelle des travaux d’amélioration et de rénovation sont effectués sur nos accélérateurs. » explique Loraine Massarotti. « Elles permettront aux visiteurs de découvrir les installations aussi bien en surface qu’en souterrain. Accessibles gratuitement, des débats, projections de films, représentations théâtrales, ateliers d’expérimentation, et des dizaines de points de visite répartis sur tout le site les entraîneront au cœur de notre Laboratoire, au contact direct de la science d’aujourd’hui et de demain. »
Les scopes de l’UNIGE
A Genève l’Université organise de nombreuses activités pour le grand public, notamment par le biais de ses ateliers scientifiques scopes . Par exemple, l’Observatoire va organiser du 15 au 20 septembre, un congrès mondial de planétologie au CICG (2000 astronomes). En parallèle une exposition sur la plaine de Plainpalais est prévue avec la mise en place de la structure du Very Large Telescope, le plus grand télescope du monde. Et, entre le 14 octobre et le 15 novembre, le lancement de CHEOPS, le premier satellite suisse, sera diffusé en direct depuis l’Uni Dufour.
Pour ceux qui préfèrent la biologie, outre l’accès au laboratoire de bactériologie pour des visites et des activités thématiques avec les chercheurs, afin de découvrir les sciences de la vie, on relèvera la possibilité de découvrir l’activité des microbes dans l’environnement en suivant un parcours didactique dans la région touristique du Val Piora au Tessin.
A l’Université de Lausanne, s’il n’y a pas de possibilité « touristique » de visiter les labos, Centre interdisciplinaire de recherche sur la montagne RechAlp et l’exposition multimédia itinérante dans les Alpes vaudoises inAlpe , collaborent avec Vaud Rando et Gastro-Vaud pour des excursions guidées.
Le volcanologue qui raconte les paysages

Car naturellement, c’est le terrain que privilégient les touristes scientifiques (comme beaucoup de scientifiques). De ce point de vue le géologue et volcanologue genevois Thierry Basset organise et guide des excursions et des voyages géologiques non seulement extraordinaire mais à tous les prix. «Chaque paysage a une histoire, explique-t’il. Du tsunami sur le Léman en l'an 563 à la ruée vers l’or à la Dent de Vaulion en passant par les éboulements des jardins du diable à Derborence ou par la débâcle du glacier du Giétro dans le val de Bagnes en 1818 Thierry Basset raconte les paysages et donnent un sens à leur beauté.
Il le fait même parfois en musique avec des soundwalks . Enfin , Thierry Basset emmène aussi ses clients hors de Suisse que ce soit pour découvrir Lanzarote et ses 300 volcans, Santorin et la légende de l'Atlantide ou pour marcher le long de la fissure éruptive de Eldgjá en Islande. Parfois c’est encore plus exotique comme pour l’expédition qu’il prépare au Guatemala pour aller observer les coulées de lave du Pacaya, les explosions du Fuego et les nuées ardentes du Santiaguito.
Thierry Basset qui a commencé son activité en 1999 confirme l’intérêt de plus en plus marqué pour les voyages scientifiques. « Quand on parle du réchauffement finalement on parle de la planète. Du coup la curiosité des gens s’aiguisent.»
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