Impôts: les vrais chiffres qui pénalisent les Romands
Malgré les baisses d’impôt de ces dernières années, la taxation des particuliers reste forte dans les cantons francophones. Leur portrait livre des résultats auxquels on ne s’attend pas vraiment.
Il y a des chiffres qui ne retiennent plus guère l’attention. Car leur publication ne contient aucune nouveauté en dépit de leur haute signification sur la compétitivité d’une région. Il en est ainsi de la charge fiscale des particuliers dans les cantons et les communes de Suisse.
On s’est habitué à plonger dans les profondeurs du classement pour y trouver les Romands. Les dernières données de l’Administration fédérale des finances diffusées au mois de décembre dernier confirment une nouvelle fois leur mauvaise position concurrentielle: ils se classent tous entre le 19 e et le 26 e et dernier rang. Les trois premières places restent trustées par Schwytz, Zoug et Nidwald. La performance est, en revanche, légèrement meilleure pour certains chefs-lieux selon les catégories de revenus (voir le tableau à la page suivante).
Les différences entre Romands et Alémaniques s’expliquent pour plusieurs raisons, dont la masse fiscale à disposition pour couvrir les charges. A la lecture des nombreux chiffres collectés par la Confédération et les cantons, on découvre une réalité souvent méconnue, comme le montre Bilan au fil de ces pages. Le portrait fiscal de chaque canton romand livre des résultats auxquels on ne s’attend pas vraiment.
Première constatation: les Romands ont pu, comme les Alémaniques, économiser plusieurs milliers de francs d’impôts grâce à la baisse de l’imposition sur les personnes physiques. Par exemple, la charge fiscale (canton, commune et paroisse) d’une personne mariée avec deux enfants touchant un revenu annuel brut de 150 000 francs a diminué de 36% à Sion entre 2003 et 2012.
Deuxième constatation: le nombre de contribuables qui ne paient aucun impôt ne cesse d’augmenter. Leur part grimpe même jusqu’à un cinquième et un tiers dans les cantons de Vaud et de Genève. «Ce phénomène est préoccupant», relève Denis Boivin, responsable du département fiscal et juridique de la fiduciaire BDO. «Faut-il exiger que tous les contribuables s’acquittent d’un impôt sur le revenu même si celui-ci est faible? Cette question, d’ordre philosophique, mériterait d’être mise sur la table. Elle touche aux liens qui unissent les citoyens à la république.»
Un avis partagé par Bernard Dafflon, professeur émérite de finances publiques à l’Université de Fribourg: «Une catégorie toujours plus importante de citoyens peut décider des dépenses de la collectivité sans en supporter les conséquences financières. Cette situation est inacceptable. Je suis favorable à l’idée d’un impôt forfaitaire minimal donnant au citoyen conscience qu’il est aussi contribuable et pas seulement bénéficiaire.»
Troisième constatation: environ 10% des contribuables paient entre 43 et 47% de l’impôt sur le revenu, et jusqu’à 58% à Genève. «La part d’impôt payé confirme la structure inégalitaire des revenus bruts», constate Marius Brülhart, professeur à l’Université de Lausanne.
Quatrième constatation: les différences d’imposition sont importantes selon le lieu de domicile. La pression fiscale est en général plus forte dans les villes et dans les cantons urbains que dans les petites communes et les cantons ruraux en raison de la lourdeur des charges à assumer. Si Greng (Fribourg), Genthod (Genève), Coinsins et Vaux-sur-Morges (Vaud) figurent parmi les plus attrayantes, c’est uniquement dû à la présence sur leur territoire de contribuables très fortunés.
Cinquième constatation: la fiscalité, prise isolément, n’est pas suffisante pour mesurer l’attractivité d’un lieu de résidence. Prenez le Jura: les impôts sont plus lourds qu’ailleurs mais, selon Credit Suisse, le revenu disponible après toutes les dépenses obligatoires (impôts, cotisations sociales, primes de l’assurance-maladie, logement, électricité) est le plus élevé de toute la Suisse romande en raison des faibles coûts de l’immobilier. Par exemple, le prix d’un terrain viabilisé ne coûte que 60 francs le mètre carré à Boncourt.
Sixième constatation: l’imposition peut varier considérablement selon le type de ménages et les classes de revenus. Les cantons de Genève et du Valais favorisent les familles par le biais des déductions sociales importantes. Et la progressivité de l’impôt est plus forte au bout du Léman qu’ailleurs. Autrement dit, les petits revenus sont avantagés.
Septième constatation: la charge fiscale marginale représente une donnée importante car elle détermine l’impôt qui est prélevé sur la dernière tranche de revenu. En clair, elle constitue un élément essentiel dans le choix de reprise d’une activité lucrative ou pour occuper un emploi annexe.
Or, la charge marginale varie considérablement selon les cantons et les catégories de revenus. Selon les données de l’Administration fédérale des contributions pour les chefs-lieux cantonaux, elle s’élève seulement à 2,6% à Genève (le taux le plus bas de Suisse), mais à 19,5% à Neuchâtel pour une personne mariée avec deux enfants dont le revenu annuel brut du travail augmente de 60 000 à 80 000 francs. En clair, ce contribuable paie 520 francs et 3900 francs d’impôt supplémentaire pour cette augmentation de revenu de 20 000 francs selon qu’il vit au bout du Léman ou sur le Littoral.
Canton de Genève - -
Le canton de Genève est le cancre de la Suisse dans le domaine de l’imposition des personnes physiques. Il se classe bon dernier de la charge fiscale calculée par l’Administration fédérale des finances avec un potentiel de ressources grevé de redevances fiscales de 35,5%.
Mais le tableau n’est pas sombre pour toutes les catégories de contribuables. D’une part, comme l’assujettissement à l’impôt (il indique le montant des revenus bruts du travail à partir duquel débute la perception) ne commence qu’avec un revenu de 75 760 francs (pour un couple marié avec deux enfants), son chef-lieu parvient à se hisser au 1 er rang helvétique pour l’imposition d’un revenu de 80 000 francs. Pour un couple marié avec deux enfants, l’impôt cantonal, communal et paroissial s’élève à 546 francs par an. C’est environ deux fois moins qu’à Zoug et onze fois moins qu’à Neuchâtel.
En revanche, du fait de la forte progressivité de l’impôt cantonal, Genève ne figure qu’à la 11 e place pour un produit brut du travail de 150 000 francs. La facture se monte à 12 955 francs. D’autre part, même si la charge fiscale est en moyenne plus lourde que dans d’autres capitales cantonales, elle a considérablement reculé entre 2003 et 2012: de 3591 à 546 francs pour un revenu brut de 80 000 francs et de 18 352 à 12 935 francs pour celui de 150 000 francs.
Comme dans les autres cantons, le différentiel d’impôt est aussi important entre Genthod, la commune la plus généreuse envers ses contribuables, et Avully et Chancy, les plus chères du canton. Il passe du simple au double pour le revenu imposable. Le canton de Genève se caractérise par ses extrêmes. Au bas de l’échelle: 11% ne paient pas d’impôts et 31,2% ne s’acquittent que 1,2% de l’impôt. Autrement dit, la facture fiscale d’environ 79 000 contribuables ne s’élève en moyenne qu’à 282 francs par an.
En haut de l’échelle: 3,7% règlent 39,9% de l’impôt. En clair, 9503 contribuables dépensent en moyenne 79 000 francs par an pour être en ordre avec le fisc cantonal. Et ce sans compter l’impôt communal. Ces données, valables pour l’année fiscale 2010, sont publiées par l’Office cantonal de la statistique (OCSTAT).
Or, elles ont fortement évolué, surtout pour les faibles revenus, en raison de la baisse de l’imposition des couples mariés entrée en vigueur au 1 er janvier 2001. Pour cette année-là, environ 33% des contribuables ne paieraient plus d’impôts. Dans une étude publiée en mars 2013, l’OCSTAT a pu remonter à la répartition du revenu annuel brut fiscalisé pour la période entre 2003 et 2009.
Selon ses conclusions, son évolution a fortement divergé pendant cette période: le revenu des 10% de contribuables les plus aisés a augmenté de 12% au cours de cette période, voire même de 16% pour les 5% les plus riches, alors que celui des 10% de contribuables les moins aisés a reculé de 12%.
Mais il serait faux de tirer de ces chiffres des conclusions sur leur appauvrissement. Car la notion de contribuable est différente de celle de ménage: un contribuable, par exemple un étudiant dont le revenu est faible, peut vivre chez ses parents dont le niveau de vie est élevé.
Canton de Vaud - -
La position concurrentielle du canton de Vaud reste défaillante. Il prend seulement la 23 e place de la charge fiscale en Suisse et il faut descendre au 17 e et au 22 e rang des chefs-lieux pour tomber sur Lausanne où les impôts cantonaux, communaux et paroissiaux sont particulièrement lourds. Pour un couple marié avec deux enfants disposant d’un revenu brut du travail de 80 000 et de 150 000 francs, l’impôt s’élève respectivement à 3930 francs et à 17 730 francs.
De surcroît, contrairement à d’autres chefs-lieux, la pression fiscale a certes baissé mais dans une proportion moindre qu’ailleurs: entre 2003 et 2012, l’imposition a reculé respectivement de 29 et de 7% pour un produit du travail de 80 000 et de 150 000 francs.
Ce sont les contribuables des communes résidentielles de Coinsins et de Vaux-sur-Morges qui paient le moins d’impôts dans le canton de Vaud. Par exemple, un couple marié avec deux enfants déclarant un revenu imposable de 50 000 francs ne s’acquitte que de 894 francs au niveau communal. S’il vit dans la commune rurale de Treytorrens (entre Lucens et Estavayer-le-Lac), la facture grimpe à 1925 francs. Selon une étude publiée en 2012 par le Service cantonal de recherche et d’information statistiques (Scris), «la distribution des revenus entre les contribuables montre une répartition très inégale».
Les données pour l’année fiscale 2010 montrent que les 10% les plus pauvres (premier décile) perçoivent 0,7% du revenu brut total, soit plus de quarante-neuf fois moins que les 10% les plus riches qui concentrent 34,5% du revenu brut. Ces derniers rassemblent une part presque équivalente à celle des sept premiers déciles. Des chiffres qui n’ont probablement guère évolué ces trois dernières années.
Cette analyse révèle aussi l’impact redistributif de la fiscalité: «La quasi-totalité des classes de contribuables paie une part de l’impôt qui est inférieure à leur part du revenu. Seul le dernier décile paie une part de l’impôt cantonal sur le revenu plus élevée que la part du revenu collecté.»
Comme Genève, le canton de Vaud se caractérise par ses extrêmes. D’un côté, d’après les statistiques du Scris, environ 16% des contribuables âgés de 21 ans et plus ne paient pas d’impôts. Une proportion qui monte à 22% selon l’Administration cantonale des impôts qui calcule ce taux sur l’ensemble des contribuables (+18 ans).
Cette population se compose à la fois de personnes à l’aide sociale, de jeunes en formation, d’indépendants qui ont réalisé des pertes, etc., mais on ne parvient pas à connaître la répartition par catégorie. Ce phénomène inquiète le ministre vaudois des Finances. «On s’approche de ce que les théoriciens nomment la «tyrannie des exonérés» capables, par leur simple nombre, de rejeter tout à fait démocratiquement sur les autres la totalité du coût de l’Etat», relève Pascal Broulis dans son livre L’impôt heureux .
A l’autre bout de l’échelle, 344 contribuables (0,09%) touchent un revenu brut total de 941 millions et paient 155 millions d’impôts (5,9%) et 559 contribuables (0,15%) possèdent une fortune brute de 20 milliards de francs sur laquelle ils s’acquittent d’une facture de 77 millions de francs (22%).
Canton de Neuchâtel - -
Le canton de Neuchâtel reste un enfer fiscal! Il se classe au 22 e rang de la charge fiscale et son chef-lieu figure à la dernière place des 26 capitales cantonales pour l’imposition d’un revenu brut du travail de 80 000 et de 150 000 francs sur le plan cantonal, communal et paroissial.
De surcroît, l’assujettissement à l’impôt débute à un niveau très bas: 8890 francs pour un célibataire et 16 155 francs pour un couple avec deux enfants. Seuls les cantons de Schwytz et d’Appenzell Rhodes-Intérieures précèdent celui de Neuchâtel.
«Cette situation s’explique par la structure du canton. D’un côté, il se caractérise par la présence de plusieurs centres urbains (Neuchâtel, La Chaux-de-Fonds et Le Locle) et par une offre très large dans la formation avec notamment la présence d’une université. De l’autre, il se démarque par un petit bassin de population de 175 000 habitants dont une partie relativement importante, en comparaison intercantonale, travaille dans l’industrie qui offre en moyenne des salaires peu élevés», affirme le ministre des Finances Laurent Kurth.
Autrement dit, la cherté des coûts du ménage cantonal repose sur de trop faibles ressources. Le résultat de ce décalage se traduit par une charge fiscale élevée pour tous les contribuables. Ce n’est pas une surprise: le Littoral, à savoir les districts de Boudry et de Neuchâtel, contribue davantage au produit de l’impôt des personnes physiques (revenu et fortune) que le haut du canton. Logiquement, on trouve la commune qui offre le taux d’imposition le plus bas sur les rives du lac: les contribuables de La Tène paient un impôt moins élevé qu’aux Verrières à la frontière franco-suisse.
La ventilation du revenu imposable par catégorie montre une structure plus ou moins comparable aux autres cantons romands: 16% des contribuables ne paient aucune contribution à la collectivité publique et les 45% qui disposent d’un revenu imposable entre 4001 et 50 000 francs règlent 16% des impôts.
Les statistiques fiscales montrent aussi une face méconnue de la démographie. Les contribuables dont les revenus imposables sont supérieurs à 100 000 francs sont beaucoup plus nombreux à avoir au moins trois ou quatre enfants à charge que les autres catégories de la population soumis à l’impôt.
La lourdeur de l’imposition a eu pour conséquence un exode des contribuables (environ 500 par an depuis dix ans) vers la Broye fribourgeoise, la région de Bienne et l’arc lémanique. Pour tenter d’enrayer le phénomène, le canton de Neuchâtel a accepté au printemps 2012 une vaste réforme fiscale qui se concrétise progressivement depuis l’année fiscale 2013.
Objectif: diminuer l’imposition des trois-quarts des contribuables de telle manière que le canton passe devant Vaud, Berne et Jura pour la fiscalité des familles. La marge de progression est importante. Entre 2003 et 2012, l’impôt prélevé en ville de Neuchâtel n’a reculé que de 4% pour un revenu brut de 150 000 francs et de 14% pour celui atteignant 80 000 francs.
Canton de Fribourg
Dans le canton de Fribourg, la pression fiscale a davantage reculé que dans les régions romandes au cours des dernières années. Entre 2003 et 2012, l’impôt prélevé sur un revenu brut du travail de 80 000 francs et sur celui de 150 000 francs a chuté de 45% et de 22% pour un couple marié avec deux enfants.
Or, le canton noir et blanc a dû mettre un terme à cette politique en raison de la détérioration des comptes publics et des mauvaises perspectives financières. De surcroît, la forte croissance démographique a entraîné un recul des recettes fiscales par contribuable. Une première dont le canton se serait bien passé. Le Conseil d’Etat a donc renoncé à présenter une nouvelle réforme de l’imposition des personnes physiques. Cette dernière prévoyait une nouvelle diminution, par étapes, de l’impôt. Pour limiter la casse, le canton a dû mettre en œuvre un programme d’économies qui touche particulièrement les collaborateurs de l’Etat dont les salaires baisseront temporairement entre 2014 et 2016.
Malgré huit baisses accordées jusqu’en 2012, Fribourg reste dans la deuxième partie du classement de la charge fiscale des cantons et des communes et au-dessus de la moyenne nationale. Il pointe seulement au 19 e rang, mais parvient néanmoins à décrocher la palme du meilleur classement des cantons romands.
La lourdeur de l’imposition ne disparaît pas en quelques années quand celle-ci remonte à des décennies. D’autant que les autres cantons s’efforcent simultanément d’améliorer leur position concurrentielle. L’attractivité de son chef-lieu se situe dans la moyenne inférieure. Il termine au 14 e rang du classement de la charge fiscale due par un couple marié avec deux enfants dont le revenu atteint 80 000 francs et au 18 e rang pour un revenu de 150 000 francs. Avec la hausse d’impôt qui a été acceptée en ville de Fribourg, sa position concurrentielle risque d’empirer dès cette année.
Comme dans le canton de Neuchâtel, les statistiques fiscales montrent que les contribuables les plus aisés ont aussi le plus d’enfants: 1396 (soit 18% d’entre eux) élèvent trois ou quatre rejetons. Le différentiel d’imposition entre la commune la plus avantageuse et celle la moins attractive est le plus important des cantons romands. Greng, près de Morat, affiche un coefficient de 25%, contre 105% pour Oberschrot dans le district germanophone de la Singine.
Autrement dit, l’impôt communal facturé par cette dernière est plus de quatre fois supérieur à celui prélevé par Greng. Cette situation exceptionnelle s’explique par la présence de l’épouse d’un contribuable aisé dans la commune lacoise qui est décédé en 2009.
Le canton de Fribourg compte moins de millionnaires que les autres cantons romands. Seuls le Jura et Neuchâtel sont moins bien lotis. Les 3370 personnes dont la fortune imposable dépasse le million de francs ne représentent que 2,3% du nombre total de contribuables, mais paient 60% de l’impôt. Au niveau du revenu, 9,3% des contribuables s’acquittent de 43% de l’impôt.
Canton du Valais - -
Le Valais? C’est le deuxième canton romand le plus avantageux après Fribourg si on se fie aux chiffres de l’Administration fédérale des contributions. Mais, en se classant 20 e , il reste néanmoins au-dessus de la moyenne nationale.
En d’autres termes, ses prélèvements sont plus lourds que dans les autres régions du pays. En revanche, Sion figure parmi les chefs-lieux helvétiques les plus attractifs pour un couple marié avec deux enfants. Il se classe respectivement au 4 e et 8 e rang pour un revenu brut du travail de 150 000 francs et de 80 000 francs.
Les Valaisans récoltent les fruits d’une politique fiscale agressive. L’an dernier, ils ont bénéficié pour la dixième fois en douze ans d’une réduction d’impôts par le biais de différentes mesures qui ont été d’abord profitables à la classe moyenne.
En dix ans, la baisse des prélèvements calculée pour les contribuables du chef-lieu est impressionnante. Entre 2003 et 2012, l’imposition pour un couple marié avec deux enfants a en effet reculé de 49% pour un produit brut du travail de 80 000 francs et de 36% pour celui atteignant 150 000 francs. Les objectifs poursuivis par le Conseil d’Etat sont clairement définis. Il s’agit de «maintenir le pouvoir d’achat des contribuables valaisans et de renforcer l’attractivité du canton et sa capacité concurrentielle».
Le canton se distingue aussi par sa capacité à attirer les personnes aisées grâce à l’absence d’impôt sur les successions en faveur des conjoints et des héritiers en ligne directe. 7275 contribuables déclarent une fortune imposable supérieure à 1 million de francs.
C’est davantage que le canton de Vaud, lequel compte pourtant plus d’habitants. Et 1605 personnes possèdent même un patrimoine dépassant les 2 millions de francs. «Dans le canton de Vaud, mais aussi dans celui de Neuchâtel, nous constatons que des contribuables déménagent en Valais pour échapper à l’impôt sur les successions. Cela concerne notamment les capitaines d’industrie qui veulent transmettre leur entreprise à leurs descendants», constate Denis Boivin.
Parmi les communes les plus attrayantes figurent Bagnes, sur laquelle s’étend la station de Verbier, Finhaut, Salvan et Hérémence qui bénéficient des retombées financières des barrages. Quant à la répartition du revenu imposable et de l’impôt, elle est plus ou moins similaire à celle d’autres cantons. 48,6% des contribuables s’acquittent de 18% de l’impôt sur le revenu, tandis que 7,1% en paient 36,5%.
Canton du Jura - -
A l’instar de Neuchâtel et de Genève, le Jura nage dans les profondeurs des classements. Il faut aller jusqu’à l’avant-dernière place de la charge fiscale des cantons et des communes de ce pays pour trouver son nom. De même, son chef-lieu Delémont figure au même rang des 26 capitales cantonales pour l’imposition de produit brut du travail de 80 000 et de 150 000 francs sur le plan cantonal, communal et paroissial. Malgré une baisse de l’imposition entre 2003 et 2012 pour ces deux catégories de revenus de 28 et de 14%, la pression fiscale reste importante dans la capitale.
Dans le Jura, 10% des contribuables ne disposent pas d’un revenu imposable suffisant pour s’acquitter d’un impôt, alors que les 10% les plus riches règlent environ 46% de la facture. Seules cinq personnes déclarent un revenu imposable supérieur à 1 million de francs.
En clair: le Jura est aux antipodes de l’arc lémanique. Rares sont les salariés, y compris parmi les cadres des entreprises et de l’administration, qui touchent des rémunérations très élevées. «Contrairement à d’autres cantons comme Genève soumis à de fortes fluctuations, nos recettes fiscales restent plus ou moins stables quelle que soit la conjoncture», relève François Froidevaux, chef du Service cantonal des contributions.
C’est à la frontière franco-suisse que s’étend la commune la plus avantageuse du canton: Boncourt. Ses contribuables paient 38% de moins d’impôts que ceux de Basse-Allaine à environ cinq kilomètres de là. Malgré cette attractivité, le nombre d’habitants diminue à Boncourt. Mais celle-ci compte inverser la tendance grâce à l’ouverture complète de la Transjurane et la liaison toute proche avec le TGV vers Paris.
Comme son voisin neuchâtelois, le Jura a tenté de lancer une vaste réforme visant à faire chuter les impôts de 10% en moyenne. Le recul de l’imposition devait permettre d’élargir l’assiette fiscale en tentant d’attirer des contribuables aisés. Mais le Grand Conseil a refusé, craignant une baisse des prestations et la persistance des difficultés financières.
Désormais, la réduction de l’imposition des personnes physiques passe par des mesures ciblées, en plus de la baisse annuelle de 1% du barème fiscal. Ainsi le canton supprime-t-il dès cette année les discriminations que subissaient les couples mariés ou pacsés par rapport aux concubins et aux familles monoparentales. Les premiers bénéficient désormais d’une déduction de 3500 francs. Ce qui permettra, dans certains cas de figure, aux communes jurassiennes d’être plus compétitives face à leurs rivales bernoises.
Selon les calculs du fisc, les impôts perçus à Delémont sur des revenus bruts du travail dès 60 000 francs et dès 80 000 francs seront réduits de 20 et de 10% pour un couple marié sans enfants par rapport à ceux prélevés à Moutier. Le recul de l’imposition passe aussi par d’autres mesures comme le relèvement à 10 000 francs de la déduction maximale accordée pour les frais d’instruction des enfants et une hausse de la déduction pour les enfants à charge des primes de la caisse maladie.
«Le fisc avantage Les contribuables aisés»
Pour Bernard Dafflon, professeur émérite de finances publiques de l’Université de Fribourg, l’imposition des plus fortunés reste acceptable. - -
Les Romands paient davantage d’impôts que les Alémaniques. Et, en Suisse romande, les Neuchâtelois beaucoup plus que les Valaisans. Pour quelles raisons?
Les études que j’ai menées dans le domaine des finances publiques montrent qu’il n’y a pas une corrélation significative entre la qualité des prestations d’un canton et les recettes fiscales prélevées sur les contribuables. Le niveau d’impôt dépend surtout du volume des revenus et de leur distribution par strate de contribuables à disposition de chaque canton.
Si on se tourne vers des explications de type socioéconomique, on peut pencher vers la thèse selon laquelle les cantons urbains dépensent davantage dans certains domaines – par exemple pour la culture et les infrastructures sportives – que les cantons dits ruraux.
Pourquoi les impôts diffèrent-ils beaucoup dans un même canton?
Les prestations offertes par la commune la plus chère sont-elles proportionnellement meilleures que celles proposées par la commune la moins chère? Probablement pas. D’autant que la marge de manœuvre financière est fortement limitée par les exigences normatives cantonales dans divers domaines comme l’école, la santé, l’aide sociale ou l’environnement.
Ces différences d’imposition, difficilement explicables selon les principes des finances publiques, entraînent une double ségrégation: sociale, du fait du prix élevé de l’immobilier qui capitalise les écarts prestations-impôts, et territoriale par le biais de la limitation de nouvelles zones à bâtir.
10% des contribuables versent entre 43 et 47% de l’impôt et 58% à Genève. Les riches paient-ils trop d’impôts?
L’imposition sur le revenu, de même que celle sur la fortune, reste acceptable en regard des taux pratiqués à la marge. Elle avantage même plus le contribuable aisé. D’une part, le taux n’est plus progressif dès un certain seuil de revenu imposable (environ 200 000 à 250 000 francs selon les cantons).
A partir de ce montant, il devient proportionnel. Une étude réalisée au Tessin montrait que la progressivité de l’impôt s’arrêtait au salaire moyen des parlementaires. D’autre part, les revenus élevés ont plus facilement accès en amont à un plus grand nombre de déductions fiscales. Ce qui leur permet de réduire considérablement le revenu imposable.
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