Assouplissement de l'embargo: bol d'air en vue pour l'économie cubaine
L'assouplissement de l'embargo américain qui pèse depuis plus d'un demi-siècle sur Cuba va avoir un impact favorable, rapide et multiple sur une économie cubaine moribonde.

L'assouplissement de l'embargo américain qui pèse depuis plus d'un demi-siècle sur Cuba va avoir un impact favorable, rapide et multiple sur une économie cubaine moribonde malgré les récentes réformes du régime communiste, estiment les experts. - - Les mesures économiques annoncées mercredi par Barack Obama "provoqueront non seulement un bond du commerce avec les Etats-Unis et un afflux accru de touristes, mais enverront aussi un signal très favorable à la communauté internationale sur l'avenir économique de l'île", expose à l'AFP l'économiste cubain Pavel Vidal, de l'université Javeriana de Cali, en Colombie. - - Les principales dispositions du blocus commercial instauré en 1962 par le président Kennedy sont maintenues, en attendant leur éventuelle levée par le Congrès. - - Mais une série de mesures a déjà été annoncée pour favoriser les échanges économiques entre les deux pays. - - Ainsi pour la première fois depuis des décennies, les Américains pourront désormais utiliser leurs cartes de crédit à Cuba et les institutions américaines pourront ouvrir des comptes dans les institutions financières cubaines. - - Chaque année, plus de 90.000 citoyens américains se déplacent à Cuba, malgré les restrictions contre l'île qui empêchent les Nord-Américains d'y dépenser de l'argent ou d'importer des produits cubains. - - Un chiffre qui risque d'augmenter car l'administration Obama va lever dans les prochaines semaines les restrictions de voyage vers Cuba pour les 12 catégories de voyageurs qui sont actuellement autorisées sous conditions, dont par exemple les parents des habitants de l'île. - - Dans le même temps, le plafond pour l'envoi d'argent depuis les Etats-Unis vers Cuba passera de 500 à 2.000 dollars par trimestre. Et ces sommes pourront être consacrées à l'entreprenariat privé. - - "Des effets favorables sont prévisibles pour l'économie à moyen terme, mais aussi à brève échéance avec l'augmentation des touristes et des investissements. Cela va bénéficier à la fois aux grandes entreprises et au secteur privé émergent de petite échelle", poursuit M. Vidal. Ces secteurs pâtissent cruellement d'un déficit structurel en investissements, précise-t-il. - - - Un impact au-delà des Etats-Unis -
Ces dernières années, le régime communiste a lancé une série de réformes pour stimuler le petit commerce privé, qui concerne aujourd'hui un demi-million de Cubains. Il a donné à 140.000 agriculteurs des terres en usufruit, qui sont venus s'ajouter à 100.000 petits propriétaires. - - Pour ces petits opérateurs économiques, l'autorisation par Washington de la vente et l'exportation de certains "biens et services" à destination du secteur privé cubain pourrait aussi constituer une réelle bouffée d'air frais. - - Et si la normalisation cubano-américaine est menée à bien, avec un retrait de l'île de la liste des pays soutenant le terrorisme, "les coûts et risques d'entretenir des relations avec l'économie cubaine se réduiraient considérablement", estime M. Vidal. - - Pour l'expert, ces nouvelles dispositions surviennent à un moment "idéal pour le début de la nouvelle politique en faveur de l'investissement étranger et pour la Zone spéciale de développement (du port de) Mariel, qui portent aujourd'hui les espoirs d'augmentation de la croissance du PIB cubain". - - De même, la situation pourrait soulager les Cubains, inquiets de la situation économique délicate de son partenaire vénézuélien, qui lui cède du pétrole à des conditions très avantageuses. - - En juin dernier, les autorités cubaines ont adopté une nouvelle loi sur les investissements étrangers, indispensables pour redynamiser une économie au point mort et accompagner la libéralisation partielle de l'initiative privée. - - Ouverts depuis 2001 à certains types d'aliments et de produits pharmaceutiques, les échanges entre Cuba et les Etats-Unis, 9e partenaire commercial de l'île, sont aujourd'hui en déclin. En 2008, ils s'élevaient encore à 962 millions de dollars, contre 401 millions en 2013. - - Ce commerce, circonscrit aux navires non cubains et assorti d'une interdiction du crédit, a été freiné lorsque l'administration de George W. Bush a interdit les règlements en dollars et exigé le paiement à l'avance avance des produits américains. - - Aujourd'hui, le président Obama propose de revenir sur ces restrictions et d'aller jusqu'à autoriser des banques américaines à ouvrir des représentations à Cuba pour faciliter les paiements. - - "Pour Cuba, c'est une opportunité de relancer les processus de réforme économique, de libéralisation politique et d'une ouverture accrue", souhaite l'universitaire cubain Arturo Lopez-Levy, de l'Université de New York. - - - Le dégel économique attendra un peu - - - La détente américano-cubaine pourrait à terme autoriser les touristes américains à se rendre sur l'île des Caraïbes et à y dépenser légalement de l'argent mais sans dégeler pour l'instant le commerce et l'investissement. - - Après un embargo de plus de 50 ans, la Maison Blanche a annoncé mercredi qu'elle allait relever la limite des fonds que les Américains peuvent virer à Cuba et lever les restrictions s'appliquant aux quelques Américains qui peuvent se rendre à Cuba avec des autorisations spécifiques. - - Les voyages touristiques indépendants vers Cuba resteront interdits, bien que les Américains soient aujourd'hui déjà capables de se rendre à Cuba via des visites organisées en passant par des agences habilitées par le gouvernement américain. - - Les investissements et le commerce vont rester étroitement contrôlés au titre de l'embargo total décidé en 1962 et le marché cubain ne va pas s'ouvrir immédiatement aux hôteliers, constructeurs automobiles ou compagnies de communications américaines. - - Premier signe toutefois des bénéfices qu'Américains et Cubains pourraient tirer de ce dégel, les actions des opérateurs de croisières se sont envolées mercredi à Wall Street. - - Le titre du numéro un mondial de la croisière, l'américain Carnival Corporation, a gagné 3,46%, celle de Norwegian Cruise Line Holdings 4,67%, tandis que le numéro deux mondial, l'américano-norvégien Royal Caribbean Cruises Ltd, bondissait de 6,62%. - - Présents en Floride, l'Etat au sud-est des Etats-Unis situé à 150 kilomètres de Cuba, ils voient se profiler cette nouvelle destination, très prisée avant la révolution qui avait porté les castristes au pouvoir. - - Un dégel total des relations économiques entre Washington et La Havane pourrait ouvrir entre 5 à 10 milliards de dollars d'investissements pour les entreprises américaines à Cuba, estime Gary Hufbauer du Peterson Institute for International Economics à Washington. - - "Ce n'est que le début d'un long chemin vers la normalisation. Pour la plupart, les entreprises américaines sont encore bloquées, non seulement par les sanctions américaines mais aussi par l'interventionnisme étatique à Cuba", rappelle-t-il. - - Dans un premier temps, le plafond des virements d'argent autorisés des Etats-Unis vers Cuba va quadrupler à 2.000 dollars par trimestre, et les Américains autorisés à se rendre à Cuba pourront utiliser leurs cartes de crédits à Cuba dans un certain plafond, même si les modalités restent encore floues. - - Les entreprises américaines pourront exporter des matériaux de construction et des équipements agricoles à Cuba pour aider l'émergence d'un secteur privé dans ces domaines. - - - Cigares en vedette - - - "Avec ce changement, les Cubains pourront accéder plus facilement à certaines marchandises bon marché pour améliorer leur niveau de vie et obtenir une plus grande indépendance économique vis-à-vis de l'Etat", a souligné la Maison Blanche. - - Les banques américaines pourront également ouvrir des comptes auprès des institutions cubaines pour faciliter les transferts d'argent. - - Le secteur des télécommunications devrait aussi en profiter car il va être autorisé à construire des infrastructures de téléphone et d'internet pour améliorer les communications entre les deux pays. - - Le président américain Barack Obama "a fait pratiquement tout ce qu'il pouvait sans passer par le Congrès", souligne Lawrence Ward, un avocat d'affaires international de la firme Dorsey & Whitney. - - "Obama a placé la balle dans le camp du Congrès pour engager des discussions sérieuses sur la levée de l'embargo vieux de plus de 50 ans", estime-t-il. - - Gary Hufbauer rappelle que la libéralisation des échanges va prendre d'autant plus de temps que des questions comme les indemnisations, réclamées pour la spoliation de biens américains lors de la révolution cubaine de 1959, sont particulièrement difficiles à résoudre. - - Parmi les Américains les plus heureux du dégel figurent les fumeurs de cigares. Les "Havanes" cubains ne seront en effet plus interdits aux Etats-Unis en raison de l'embargo. - - Les cigares vendus aux Etats-Unis proviennent actuellement de la République dominicaine, du Nicaragua, du Honduras et du Mexique et en plus petites quantités du Brésil, du Perou, de la Colombie et du Venezuela, selon Jay Shapiro, président du club de cigares Cigar Chamber of Commerce à Fort Lauderdale en Floride. - - "C'est bien qu'ils autorisent les Américains à rapporter des cigares cubains" lors de leurs déplacements à Cuba. "Ils font parmi le meilleur tabac au monde et le plus grand marché du monde pour les cigares va de nouveau pouvoir en profiter", souligne Eric Scism qui tient un blog consacré aux cigares "Stogies on the rocks".
AFP
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.